Chef Simon est le nouvel expert culinaire en cuisine française pour 196 flavors.
C’est avec une grande fierté que nous accueillons Chef Simon dans la famille des experts culinaires de 196 flavors. Merci encore pour votre confiance Chef ! Pourriez-vous vous présenter pour nos lecteurs qui ne vous connaitraient pas encore ?
Je suis Bertrand Simon et j’ai commencé à étudier la cuisine en 1977. A cette époque, être cuisinier n’était pas un métier franchement valorisant et j’y suis arrivé par hasard. Personne de mon entourage n’était de la profession et nous n’allions pas au restaurant. Ce monde professionnel m’était complètement inconnu.
Après deux années de formation, je suis entré dans le monde professionnel l’année de mes 17 ans. J’ai travaillé essentiellement en cuisine classique, gastronomique et étoilée pendant 10 ans avant d’intégrer l’Education Nationale.
Je suis aujourd’hui professeur de cuisine en lycée professionnel public et l’auteur et le fondateur du site Chef Simon depuis le 13 juin 2000.
Je suis aussi l’auteur de plusieurs livres de cuisine dont le fameux : En Cuisine by Chef Simon publié en octobre 2013 aux éditions du Chêne qui a connu un beau succès. Il a été publié à Taïwan et remarqué aux “Gourmet World Cook Award – France” dans la catégorie “Meilleur livre de cuisine rattaché à un site internet”.
Je vais bientôt avoir 40 ans de fourneaux et depuis 17 ans, je suis “Le Chef Simon”. Très connu dans le monde virtuel, je suis un inconnu dans le vrai monde ! J’ai travaillé dur dans la profession. J’ai eu la chance de travailler avec des chefs qui m’ont tout transmis. J’ai appris beaucoup et j’apprends encore tous les jours.
Si désormais la transmission est la principale de mes activités par la voie de l’enseignement public et laïc et par l’intermédiaire du site Chef Simon, c’est pour suivre l’exemple de ces chefs.
Je suis un chef sans cuisine, sans brigade, un chef sans clients, un chef sans nom et sans autorité, un chef sans étoile et sans renom. Je suis juste un chef transmetteur, une éminence grise, un chef de l’ombre.
Aujourd’hui encore, j’apprends, j’observe, j’expérimente et je théorise, ce qui fait de moi un cuisinier en perpétuelle remise à jour. Les bases que l’on m’a enseignées étaient très classiques et s’il faut les connaitre et les transmettre il faut aussi savoir s’en affranchir pour faire évoluer la cuisine avec son époque et ses nouvelles technologies.
Parlez-nous de vos connaissances et de votre expérience en ce qui concerne la cuisine française.
J’ai intégré l’école hôtelière du Touquet en 1977 pour étudier les bases de la cuisine. Une fois le diplôme en poche, je suis allé travailler chez Jean Claude Dufäye au restaurant “Chez Maurice” déjà remarqué à l’époque par les guides Michelin et Gault et Millau.
J’ai gravi les échelons avec difficulté en passant du poste d’aide de cuisine à celui de commis. Ce chef à l’ancienne m’a transmis les valeurs de travail qui me manquaient. Avec rigueur et méthode, j’ai continué mon apprentissage chaque jour. J’ai appris à reconnaître les produits et à les travailler.
J’ai ensuite intégré la brigade de Loïc Martin à Lille , au “Restaurant le Paris” (étoilé Michelin), là j’ai appris le travail en brigade et j’ai gravi les postes de commis à chef en second. Je suis resté plusieurs années et j’y ai consolidé mes connaissances.
Travailler en grande brigade permet d’apprendre de ses collègues qui eux aussi ont travaillé dans des grandes maisons, c’est très enrichissant, c’est une forme de compagnonnage non officiel.
Ensuite, j’ai pris différentes places de chef en restauration classique et parce que mes responsabilités familiales avaient plus d’importance que mes ambitions professionnelles, et que j’avais pris goût à la transmission, je me suis ensuite tourné vers l’enseignement.
Qu’est ce qui rend la cuisine française unique? Qu’est ce qui la différencie des autres cuisines européennes ?
Plus que les autres cuisines, la cuisine française a une particularité magnifique, c’est qu’elle est historiquement multiculturelle. Cette ouverture d’esprit lui a permis de sortir de son propre cadre en intégrant les cuisines, les savoirs et les techniques des autres cultures. Elle n’existerait pas sans ce brassage ethnique ni sans cette curiosité qui la pousse hors de ces frontières et ce besoin de trouver ses racines à tout prix.
Mais tout comme son peuple, la cuisine française est paradoxale, elle demande à être codifiée, mais chacun veut contourner les règles ! Le Français veut garder les pieds dans sa terre natale tout en se faisant pousser des ailes pour aller voir ailleurs. C’est surement ce paradoxe qui rend la cuisine française si… indéfinissable.
Quelle est votre recette française préférée ou le plat le plus inhabituel du pays ?
C’est très difficile car la richesse de la diversité me fait changer d’avis chaque jour. C’est mon instinct avant la raison qui décide.
J’aime la juste cuisson en particulier avec les poissons que je préfère “nacrés” quand la chair du poisson est toujours brillante à coeur.
J’aime les produits travaillés avec un minimum d’ingrédients presque bruts, parfois juste cuits à peine assaisonnés. Quand je déguste un filet de cabillaud ou de turbot c’est le goût du poisson sublimé que j’aime retrouver dans l’assiette.
Ce qui ne veut pas dire que je n’aime pas la cuisine épicée bien au contraire et je la pratique aussi mais vous m’avez demandé mes préférences 🙂
Je ne sais pas vraiment si la consommation est encore parlante en France aujourd’hui mais à mon avis la tête de veau (et les abats en général) fait partie du catalogue typique comme patrimonial de la cuisine française. C’est en tous cas la recette qui « choque » le plus à l’extérieur de nos frontières.
Quelles sont les autres cuisines qui influencent votre cuisine ?
J’ai une attirance forte vers la cuisine asiatique, parce que la philosophie asiatique me fascine. La sagesse et la force qui résident chez les penseurs séculaires forcent le respect.
J’aime ressentir dans la cuisine que je goûte la résonance de chaque élément mis en corrélation et la cuisine asiatique le traduit bien. La découverte passe par les saveurs délicates, les cuissons contrôlées, et la finesse apportés par un dépouillement des ingrédients choisis. L’attention apportée aux différents éléments et la philosophie induite. C’est le produit que l’on respecte et non pas le produit qui se soumet.
La technicité de la cuisine asiatique qui est le résultat d’un long apprentissage, place le cuisinier dans une forme de noblesse qui valorise son apprentissage et sa ténacité .
Le savoir faire est aussi important dans la réalisation d’un bouillon dashi ou la préparation d’un fugu, que dans un festin chinois.
J’aime dans cette culture culinaire la manière dont les produits sont traités, tous sur un même pied d’égalité. Il n’y a pas en Chine ou au Japon de produits nobles et de produits qui ne le seraient pas…
Le dépouillement autant que les performances artistiques de décoration, sculptures, postures rendent à la pratique de la cuisine une idée de culte respectueux du produit et anoblissant pour celui qui le pratique. Le respect global apporté tant au travail qu’au produit lui même a contribué aussi à me faire réfléchir sur les aspects yin et yang de la cuisine.
J’aime les rivalités du piment et du soja, du porc et de la coriandre, du croustillant de la friture allié au fondant de la crevette, et je suis carrément accro à la sauce soja de qualité.
Quels endroits recommanderiez-vous lors d’une visite en France ?
Il y a tant de petits et de grands endroits en France… Le passé de notre pays s’est construit à force de colonisations et d’invasions extérieures ou intérieures. Sa richesse dépasse l’imagination. Je pense que l’histoire d’un pays est une pièce magnifique du puzzle gigantesque de l’humanité et que chaque joyau n’appartient pas plus à une nation qu’à la population planétaire.
J’adore l’eau, le vent, le ciel infini. J’aime la mer, le littoral de la mer du nord et ses plages interminables, les calanques marseillaises, les plages de Normandie, la Loire, les châteaux cathares, les vieilles pierres… il y a tant de choses à découvrir dans notre pays qu’il est frustrant de savoir qu’on n’aura jamais le temps de faire sa connaissance convenablement.
A part votre mère ou grand-mère, quel chef français est une référence pour vous ?
La question est délicate et je ne me permettrais pas de porter un jugement sur le talent d’un chef dont je n’ai jamais goûté la cuisine si tant est qu’il soit encore aux fourneaux. Je n’ai pas le temps de courir les restaurants étoilés ou non alors je laisse à chacun le plaisir de la découverte en fonction de sa propre sensibilité.
Et je ne dis pas cela pour ne vexer personne mais parce que j’en fais moi même l’expérience au restaurant d’application du lycée avec mes élèves. Pour la même assiette servie, vous pouvez recevoir un merveilleux compliment ou essuyer une acerbe remarque et pourtant dans ce cas la note est très peu salée ! Cuisiner c’est faire à manger, ça n’est pas une guerre.
Quelles sont les principales difficultés dans la cuisine française ?
Au point de vue professionnel, la cuisine française d’aujourd’hui peut être compliquée parce qu’elle a tendance à privilégier le visuel. Il ne suffit pas de créer un plat délicieux, encore faut-il qu’il tape à l’oeil.
Elle a aussi cette habitude d’intégrer systématiquement des produits peu connus, souvent inaccessibles au grand public et dont l’intérêt reste à démontrer pour revendiquer une certaine originalité et c’est ce qui la rend parfois pédante.
Que proposeriez-vous si vous aviez à préparer un menu complet français : entrée, plat, dessert.
Le menu français traditionnel auquel tout le monde fait référence est composé d’une mise en bouche, une entrée, d’un plat principal (généralement une pièce de viande), du célébrissime plateau de fromages suivi d’un dessert et d’un café et parfois d’un digestif.
Mais ça c’est l’image d’Epinal des menus à la française encore servi pour les grandes fêtes familiales.
Plus couramment, au quotidien ce sera entrée + plat ou plat + dessert.
Je suis foncièrement détaché des traditions, mais je déplore quand même que le repas ne soit plus si souvent partagé à table. C’est souvent le seul moment où tout le monde est réuni dans la journée et ce repas partagé participe à la cohésion familiale même si le menu ne plait pas forcément à tous les convives (sauf quand c’est soirée pizza maison bien sûr).
Si je devais réaliser un menu français je choisirais des asperges en entrée parce que c’est mon péché mignon, une côte de veau à la gousse d’ail avec un gratin dauphinois typiquement français et en dessert une charlotte aux pêches façon Melba pour le côté classique.
grand utilisateur du site chef Simon, j’apprécie sa pédagogie. J’ai découvert le site 196 flavors il y a peu de temps et beaucoup de recettes me mettent l’eau à la bouche et je les teste petit à petit.
Je suis ravi que vous réunissiez vos compétences, cela nous promet de belles recettes à venir.
Félicitation et bonne continuation à tous.
Pascal
Super sympa. Et en Belgique, vous venez quand , Je vous invite 🙂
Merci pour cet entretien avec chef Simon, qui nous permet d’en savoir plus sur le personnage! Si discret, mais pourtant si présent sur le net ! Un doute sur la préparation d’un plat, la cuisson d’une viande …Chef Simon est là pour nous conseiller en image, sans prise de tête, mais en respectant les règles de l’art , et souvent avec beaucoup d’humour. Qu’il ne change rien !
Un chef génereux et remarquable, merci Vera et Mike de nous faire partager ce beau billet. Bisous